FBI Most Wanted : des archives, quelles archives ?

Publié: 2 juin 2024 dans Séries
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FBI Most Wanted est une série télévisée américaine, dérivée de la série FBI de Dick Wolf. Elle est diffusée à partir de 2020 aux États-Unis, elle est toujours produite à l’heure où nous écrivons ce billet. En France, la série est diffusée par TF1. Elle connaît cinq saisons que nous allons traiter ici.

Quelle est l’histoire ?

Nous suivons une unité d’élite du FBI, dirigée par l’agent Jess Lacroix, incarné par Julian McMahon (Charmed, Nip/Tuck). Cette unité est mobilisée à la demande de la direction du FBI sur des affaires sensibles pour traquer des criminels.

Et les archives dans tout ça ??

Toute enquête nécessite par essence une quête d’information. Et une information écrite est une donnée ou un document et par conséquent une archive. Ainsi il est logique voire inévitable de croiser des archives dans les séries policières. FBI Most Wanted ne déroge donc pas à la règle. Ainsi à chaque épisode, Hannah Gibson, l’analyste/informaticienne/pirate de l’unité, fouille et farfouille dans les bases de données gouvernementales, jamais identifiées comme des archives laissant la notion d’archives n’apparaître qu’à de rares occasions.

Il faut ainsi attendre l’épisode 16 de la saison 3 intitulée Vie secrète pour une première vraie évocation. L’unité traque un couple de criminels dont il est impossible de retrouver l’état-civil car l’état du Vermont n’a pas numérisé les registres avant 2010, poussant deux enquêteurs, Gibson déjà évoquée, et Ivan Ortiz à devoir fouiller dans « de la paperasse, les archives d’un sombre bâtiment municipal ».  Gibson se moque d’Ortiz qui tire la tête en lui demandant s’il avait « peur des boîtes en carton et de la poussière », ce dernier de lui rétorquer : « ce qui me fait peur, ce sont les petites villes qui rechignent à opter pour le numérique. » Ils finissent par découvrir un document collé à un autre et visible uniquement par la transparence, indiquant le changement de nom d’une des criminels, leur permettant de découvrir son passé et ainsi de la retrouver. Ainsi Ortiz ne voit ici que la fin (un document numérique accessible) et non les implications d’un chantier de numérisation, entre le coût et la gestion qualité d’un tel projet. Ce document collé à un autre aurait-il été numérisé et retrouvé ? Normalement oui, mais rien n’assure de la qualité d’une numérisation sans contrôle qualité ! 

document collé !

Dans l’épisode 21, de la même saison, intitulée L’argent pour seul drapeau/la femme aux mille visages, l’unité part à la recherche d’une criminelle qui utilise plusieurs fausses identités. Ayant réussi à identifier une école qu’elle a évoqué à plusieurs reprises, le FBI se rend sur les lieux de la Treetops School, une école privée aux méthodes alternatives fermée depuis plusieurs années et transformée en centre de soins par la fille de l’ancien directeur. Quand les agents demandent à accéder aux archives de l’école afin d’identifier la jeune femme, la réponse est franche et directe « nos archives ? On parle d’une bande de hippies, si jamais il y en a eu, je ne sais pas où elles sont passées ». Quand l’agent insiste, la réponse est ferme : il n’y a rien à trouver. Si clairement, la fille de l’ancien directeur fait obstacle à l’enquête en refusant de fournir des archives, cette réponse est souvent fournie aux chercheurs par les institutions. En raison d’une absence d’une vraie politique de gestion documentaire et de transmission de savoir interne, les administratifs ignorent souvent où se trouvent les archives, si celles-ci existent toujours ou même si elles ont existé, alors que parfois elles sont juste à l’étage en dessous ou du dessus, oubliées dans une cave ou un grenier.

un faux passeport de bonne qualité

Mais c’est dans l’épisode 4 de la saison 4 intitulée La Soif de l’or que nous rencontrons enfin une archiviste non nommée mais créditée sous le nom d’Emily. Les agents sont à la recherche d’un homme connecté à une victime de meurtre. Son tatouage a été identifié sur des images de vidéosurveillance des Archives nationales. En effet, l’homme aurait pénétré dans les locaux avec une carte volée pour dérober des documents. Deux agents se rendent sur place pour en apprendre plus. L’archiviste, qui est une jeune trentenaire habillée strict, leur indique que l’ensemble du fonds a été « scanné et référencé » et leur montre le double numérique des documents volés : des brochures édités par les Chevaliers du Cercle d’Or, une association pro-esclavagiste durant la Guerre de Sécession. Les agents s’interrogent sur la raison d’un tel vol et demandent à l’archiviste si ces documents ont une valeur financière, au-delà de leur valeur historique. Ce qu’elle confirme, car les documents historiques pro-esclavagistes ont une certaine cote dans les milieux suprémacistes. C’est un point rarement évoqué dans la fiction, même si nous en avons parlé dans notre billet sur Elementary. On finit par apprendre plus tard que ces documents contiendraient la localisation d’un trésor et le vol avait pour objectif d’éviter que d’autres puissent partir en quête de ce dernier. Et là on voit l’aspect facile du scénario qui n’est pas logique : dans un premier temps, comment le voleur a pu localiser dans les magasins les bonnes brochures à voler, sachant que qu’elles sont noyées dans la masse des archives, une vraie aiguille dans une botte de foin ? Dans un second temps, pourquoi voler un document qui est numérisé et donc accessible à tous ? Bref rien n’est vraiment logique et les archives se révèlent encore ici être un levier facile du scénario.

une brochure numérisée accessible uniquement en salle de lecture

Élément moteur essentiel de l’intrigue, les archives sont très peu évoquées voire mises en avant, qu’elles ne soient pas identifiées en tant que telles (3 fois seulement sur un total de 86 épisodes) ou qu’elles soient tout simplement inconnues voire ignorées. Et pourtant elles sont éminemment précieuses pour avancer dans l’intrigue, elles sont aussi précieuses pour l’histoire d’un mouvement, d’un événement ou d’un pays, tout autant qu’elles peuvent être précieuses d’un point de vue financier. C’est toute la richesse des archives.

Marc Scaglione

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