Archives de la catégorie ‘Non classé’

A la suite de notre article sur la Brigade Chimérique, ultime renaissance, le scénariste Serge Lehman a gentiment accepté de répondre à nos questions sur son rapport aux archives. Serge Lehman est à la fois un historien des sciences et un auteur qui s’illustre dans de nombreux domaines, en particulier la bande dessinée et les récits de science fiction. Il aime particulièrement se référer aux écrits des premiers auteurs français de SF et rendre hommage aux figures super-héroïques des temps passés. C’est sa vision des archives qu’il nous livre ici et nous l’en remercions bien sincèrement.

Archives et culture pop : Votre connaissance des archives irrigue la Brigade chimérique, si vous deviez en donner une définition, quelle serait-elle ?

Serge Lehman : Dans votre article, vous citez cette expression que j’aime bien : « Souvenirs d’un monde perdu. »

Archives et culture pop : Pourquoi cette attention aussi poussée et cette forte présence des archives ?

Serge Lehman : C’est un effet secondaire de ma formation. Pour ma maîtrise d’histoire des sciences sur la carte photographique du ciel, j’ai dépouillé des cartons d’archives à l’Observatoire de Paris et j’ai été frappé par la dimension immersive de l’expérience. Et c’est aussi un jeu entre érudits de la science-fiction. Mon ami, le regretté Joseph Altairac, parlait de sa gigantesque collection de livres et de revues anciennes comme de sa « documentation ». J’appelle la mienne « les archives ».  

Archives et culture pop : Au contraire des archives, vous ne montrez aucun archiviste dans votre récit, pourriez-vous nous expliquer ce choix ?

Serge Lehman : Dans Ultime Renaissance, je vois Dex et Greg comme des archivistes : ils compilent, classent, trient, indexent, thématisent… C’était déjà le rôle du Club de l’Hypermonde dans la première saison de La Brigade, il y a dix ans.  

Archives et culture pop : Vous êtes historien des sciences, peut-on retrouver un peu de vous dans le personnage de Dex et dans sa passion pour l’accumulation d’archives ? Rencontre-t-il des problématiques qui vous sont familières ?

Serge Lehman : Dex est plus ou moins ma projection dans le récit. Je partage avec lui la problématique des archives lacunaires. Et aussi, évidemment, celle des empilements de cartons à domicile. 

Archives et culture pop : Vous mentionnez souvent la notion de lacunes, d’archives partielles, est-ce une question à laquelle vous avez été confronté ?

Serge Lehman : Oui, mais plutôt sur le mode du fantasme. Je vous donne un exemple. L’invention de la science-fiction est traditionnellement attribuée à l’éditeur américain Hugo Gernsback, avec le lancement de la revue Amazing Stories en 1926, et de Wonder Stories en 1929. En France, la première trace d’une influence de Gernsback s’observe en 1935 avec la collection « Hypermondes » aux éditions de la Fenêtre ouverte. Pendant longtemps, on n’a su que très peu de choses – pratiquement rien, en fait – sur cette collection et son créateur, Régis Messac. Or, il y a une douzaine d’années, un regain d’intérêt pour Messac s’est fait sentir, soutenu par son petit-fils. Dans les documents mis à jour par celui-ci, on trouve une lettre de Gernsback à Messac, datant de 1929 je crois, où l’Américain propose au Français de diriger l’une de ses revues ! Les deux hommes en fait, se connaissaient et étaient amis depuis la nomination de Messac à l’Université MacGill. Quelle était la nature exacte de leurs relations ? Comment se sont-ils rencontrés ? Que proposait concrètement Gernsback à Messac sur le plan éditorial – et pourquoi cette offre faite à un intellectuel français inconnu ? Les réponses à toutes ces questions se trouvent sans doute dans le reste de la correspondance entre les deux hommes mais elle est indisponible ou perdue. Cette lettre dessine à demi-mots un monde inexploré… Là commence le fantasme.

Archives et culture pop : Si vous deviez explorer des archives bien réelles, vers quel type de documents vous tourneriez-vous ? 

Serge Lehman : Les archives privées des auteurs français de SF des années 1880-1950. Je subodore qu’elles sont pleines de relations insoupçonnées. 

Archives et culture pop : En conclusion, que diriez-vous à quelqu’un que vous devriez convaincre de l’utilité des archives ?

Serge Lehman : « Pensez-vous qu’avoir de la mémoire est utile ? »

The White Vault est une saga d’horreur MP3 de Fool and Scholar Productions. Initié en 2017, ce podcast entre en 2020 dans sa quatrième saison. Les épisodes de cette saga sont librement accessibles sur le site https://whitevault.libsyn.com/ ; une série dérivée, Artifacts, n’est disponible qu’aux contributeurs.

Quelle est l’histoire ?

Une expédition se rend dans une base arctique afin de réparer une balise qui a cessé d’émettre. Les réparations se font sans encombre mais les membres de l’expédition sont bloqués par un blizzard. Afin de tuer le temps, ils explorent la base et trouve un bunker, qui mène à des sous-terrains. Cependant, le groupe note des phénomènes étranges. Des messages inquiétants à la radio, des ombres, des découvertes macabres… Lorsque l’une des leurs est victime d’un grave accident, les membres de l’expédition réalisent peu à peu qu’un prédateur joue avec leurs nerfs.

Et les archives dans tout ça ??

L’auditeur ne suit pas en direct les aventures du groupe. Celles-ci sont reconstituées à partir des notes, des rapports, des lettres personnelles, des enregistrement audios ou vidéos des membres du groupe. Ce podcast s’apparente ainsi au genre cinématique du found footage, en vogue depuis le Projet Blair Witch ou Paranormal Activity, et à celui du roman épistolaire qui a notamment donné au genre horrifique le Dracula de Bram Stoker. En l’absence d’images, cette saga MP3 utilise les témoignages des protagonistes pour illustrer les sentiments d’oppression et de paranoïa grandissants, et utilise le réalisme (pas de musique en dehors du générique) pour mieux transmettre le sentiment d’angoisse.

Ces documents sont recueillis et organisés par la narratrice, qui reste anonyme. Elle se livre alors à un travail archivistique afin d’ordonner ces sources éparses afin de remettre en contexte ce qui est arrivé à l’expédition perdue. Fil rouge de la série, cette documentaliste introduit chaque document en précisant quel est son auteur, la date présumée de rédaction et le type d’information : lettre, enregistrement. Elle spécifie même le propriétaire de l’appareil dont vient le fichier si celui-ci diffère de son auteur ou autrice. La narratrice précise également l’état du document : fichier en partie corrompu, écriture altérée par des blessures ou par l’agitation de l’auteur, pages arrachée, etc. Narratrice non omnisciente, elle indique la chronologie incertaine de son classement.

Les archives recueillies doivent faire l’objet d’un traitement rigoureux. Outre la mise en contexte systématique et d’un classement chronologique, la documentaliste doit se livrer à un travail d’édition. En effet, les souterrains de la base semblent générer des ondes qui corrompent les enregistrements. De plus, plusieurs fichiers audios durent plusieurs heures, ou comprennent des passages inutiles ou répétitifs. La narratrice coupe ces longueurs, ou présente les fichiers en plusieurs parties afin de mieux recouper les différents témoignages. Les lettres ou enregistrements des membres de l’expédition, souvent dans la langue d’origine de leur auteur, sont partiellement présentés dans cette langue avant d’être traduits.

Tous ces éléments sont au service de l’atmosphère oppressante du feuilleton audio. Le simple fait que ces documents doivent être ordonnés sans l’aide de leurs auteurs laisse entendre qu’aucun ne survit aux événements. L’un des membres de l’expédition enregistre un message sur un appareil qui ne lui appartient pas ? Cela veut souvent dire que le propriétaire est blessé ou a disparu. Les différences de langues sont notamment utilisées lorsque les personnages paniquent et se replient sur eux-même. A l’opposé, la voix sans passion, analytique de la narratrice pose une distance entre les personnages de plus en plus désespérés et l’archiviste. Cependant, le final de la seconde saison dévoile l’implication personnelle de ce personnage.

L’accès à l’archive semble initialement limité à la narratrice, qui reconstitue le fil des événements au profit des auditeurs. Seule responsable des ressources qu’elle a collectées, elle choisit les éléments à mettre en avant sans que d’autres aient un accès direct à l’archive. La saison 3 casse quelque peu ce procédé. Dès le premier épisode, elle soumet les documents d’une autre expédition à un personnage présent mais silencieux, qui semble être lié à la première expédition. De plus, un nouveau personnage, une universitaire mentionnée à la fin de la seconde saison, semble avoir pris connaissance des témoignages de l’expédition perdue. Elle le montre notamment en reconnaissant les signes et les menaces auxquels ont fait face les disparus ! Le ton de la série passe d’un sentiment d’inéluctabilité dans les 2 premières saisons à l’incertitude : est-il possible de lutter contre le destin ? Au fil de cette saison, l’archiviste devient elle-même productrice des documents collectés, montrant son implication grandissante.

Jean-Baptiste Vu Van

Laurent Whale est un auteur francà-britannique auteur de romans et de nouvelles et s’intéresse notamment à la Science-fiction ou encore au thriller. L’auteur a débuté la série des Rats de Poussière avec Goodbye Billy. Elle compte à ce jour trois volumes et Laurent Whale nous a précisé qu’il n’allait pas s’arrêter en si bon chemin.

Cette série des Rats de poussière met en avant une équipe dont les archives semblent être la préoccupation première : la direction des Archives Tronquées dirigées par Dick Benton, un ex agent du FBI mis sur le banc de touche mais dans laquelle on retrouve notamment Andrew Kerouac, un archiviste qui occupe un rôle important dans les différents ouvrages.

Nous avons pu échanger avec Laurent Whale sur sa vision des archives et nous le remercions sincèrement du temps passé avec nous et de nous avoir autorisé à reprendre également quelques passages de son discours prononcé en 2017.

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Laurent Whale, photo par Carole Rannou / CC BY-SA (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0)

Archives et Culture pop : Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser aux Archives ?

Laurent Whale : Je voulais changer des sempiternels héros qui courent partout avec un badge dans une main et un flingue dans l’autre. Il me semblait plus intéressant de leur faire utiliser leur tête. D’autre part, étant grand moi-même consommateur de documentation, la démarche m’est apparue naturelle, surtout lorsque les histoires sont basées sur des personnages historiques.

Archives et Culture pop : Avez-vous déjà fréquenté des services d’archives ?

Je n’ai fréquenté un service d’archives que lors de mon intervention à La Rochelle pour l’inauguration.

D’une manière générale, c’est ainsi que je procède : couche après couche, grattant, tamisant et reniflant tel un chien truffier sous un chêne prometteur et dont l’heureux maître – que je redeviens – pourra bientôt exhiber l’or noir sur le marché de Sarlat la Caneda.

Donc, la truffe au vent, je hume les rayons physiques ou virtuels, à la recherche de ces quelques grammes de savoir qui conféreront à ma tambouille le fumet délicat de l’authenticité.

Je flaire donc, ici une biographie, là un traité d’astronomie, ailleurs encore un essai ou un recueil de pensées.

Archives et Culture pop : Andrew Kerouac vous rappelle-t-il des archivistes que vous avez connus ?

Andrew Kerouac est une pure invention mais je ne vous dirai pas s’il y a ou non un lien avec l’écrivain de la Beat Generation ! ^^

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Archives et Culture pop : Est-ce que votre vision des archives a évolué au cours de votre écriture ?

Disons que j’ai façonné les archives sur le modèle des certains services de la bibliothèque du Congrès (informations glanées sur leur site). En fait, ma vision des archives s’est affinée lorsque j’ai échangé avec les gens venus à la conférence à La Rochelle. Avant cela, je n’avais qu’une vision romantique de la chose (comme vous l’avez sûrement noté dans mes ouvrages).

Archives et Culture pop : Que signifient les archives pour vous ?

Pour moi, les Archives sont une source inépuisable d’inspiration. J’aime l’idée qu’on puisse y vivre mille vies, même si je me sers essentiellement d’Internet, de livres et de magazines depuis le fauteuil de mon bureau.

Sans les Archives, sous quelque forme qu’elles soient, aucune histoire ne serait possible, au sens propre comme au romanesque.

Les archives, qu’elles soient papier, numériques, vidéo ou audio font partie de ma vie d’auteur.

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Je dirais même qu’elles en sont les fondations.

Elles sont constituantes de toute œuvre littéraire, dès lors que l’on aborde un sujet inconnu ou non maîtrisé. Et même si l’on pense en posséder les moindres recoins, il subsiste toujours un angle obscur qu’un ancien a jadis éclairé différemment, filtré au prisme de son époque, de son ressenti et de celui de ses contemporains.

Plus généralement, le patrimoine à un emploi triple : celui d’informer, de cultiver et d’inspirer.

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La fable du laboureur et ses enfants illustre à merveille ce propos.

Cet homme, au soir de sa vie, convoque sa descendance et laisse entendre qu’un trésor se dissimule dans le verger… La suite et sa chute sont bien connues des écoliers de jadis : les fils retournent tant et si bien la terre qu’elle leur rapporte plus que ne l’aurait fait le produit d’un travail ordinaire.

On le voit : musarder sans but est certes plaisant, mais creuser en profondeur rapportera toujours plus de fruits.

En cela, la numérisation est l’outil idéal du jardinier d’idées.

Un monde sans passé, sans histoire avec un grand H n’est pas concevable, même s’il a sans doute fait – et fera encore – le bonheur des écrivains de Science-fiction.

Chaque ruisseau qui s’éteint, même le plus modeste, assèche le lac.

Alors oui, cette valorisation est vitale, essentielle, nécessaire et obligatoire. L’accès à cette manne doit être libre et aisé. Pas simplement pour les écrivains ou les métiers du livres, mais pour tous, à tous âges et de toute condition.

 

Un grand merci à Laurent Whale.

 

Pour fêter l’anniversaire de la naissance de ce blog, nous avons décidé de laisser nos colonnes à nos lectrices et lecteurs afin qu’ils nous donnent leur avis sur notre travail. Merci à celles qui ont répondu et n’hésitez pas à donner votre avis, nous compléterons l’article au fur et à mesure.

 

Céline Guyon, présidente de l’AAF

Pouvez-vous vous présenter en quelques lignes ?

Je suis archiviste, présidente de l’Association des archivistes français pour un mandat de 3 ans. Mon goût pour la collecte des archives contemporaines m’a amené assez rapidement à m’intéresser à l’archivage électronique. Ma récente activité d’enseignant-chercheur associé à l’ENSSIB où je co-dirige le master Archives numériques, me permet de combiner une pratique de terrain avec une approche réflexive de mon métier et de la pratique archivistique française. Par mon engagement associatif au sein de l’AAF, je cherche à ouvrir des espaces de réflexion multi disciplinaires afin de collectivement penser la place des archives et le rôle des archivistes dans la société.

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Comment avez-vous connu Archives et culture pop’ ?

J’ai connu Archives et culture pop’ au travers de la revue Archivistes ! de l’AAF. L’autrice du blog, Sonia Dollinger y tient en effet une chronique.

Qu’est-ce qui vous intéresse sur le blog ?

Je trouve toujours intéressant pour un professionnel de s’intéresser aux représentations que la société a de son métier : il y a nécessairement des enseignements à en tirer !

Ce que j’apprécie justement dans le blog c’est que son autrice ne se contente pas de dresser la litanie de ce que nous considérons, nous archivistes, comme des clichés. Elle cherche au contraire à analyser, au travers de la représentation des archivistes et des archives dans les séries, BD…, ce que leurs auteurs nous disent de la fonction archives et plus globalement sur la manière dont notre rôle est perçu dans la société. A ce titre, le croisement des sources est vraiment intéressant. Selon les genres, la représentation de l’archiviste peut en effet être très différente. Plus foncièrement, derrière chaque billet du blog, se joue aussi la question de la reconnaissance et de la légitimation de notre fonction.

Au final, mis bout à bout, comme dans la rubrique Le dictionnaire des archivistes, les multiples visages de l’archiviste mettent en lumière l’écart qu’il existe entre la manière dont les archivistes sont représentés et la manière dont on aimerait être représenté… mais je ne pense pas que cela soit propre à notre profession.

En demi-teinte, le blog nous invite aussi à nous interroger sur ce qui fait notre identité professionnelle : on est tous entrés dans le métier avec notre propre représentation de l’archiviste, parfois loin du métier que nous exerçons au quotidien !

Avez-vous apprécié un billet en particulier, lequel et pourquoi ?

J’ai bien aimé le dernier billet sur Unabomber car il a fait écho à ma lecture récente du dernier livre de Philippe Artières Le dossier sauvage où il est aussi question d’archives et de fiction. P. Artières a cette description des archives : « on leur livre un culte bavard dont nous, historien.ne.s, sommes parmi les principaux disciples »

Manhunt

Avez-vous des attentes particulières pour le futur du blog ?

Pourquoi ne pas interroger directement les auteurs sur leurs motivations s’agissant de l’introduction du personnage de l’archiviste dans leur fiction !

 

Laure Ménétrier, directrice du musée du vin de Champagne et d’archéologie régionale à Epernay.

Pouvez-vous vous présenter en quelques lignes ?

Laure Ménétrier, directrice du musée du vin de Champagne et d’archéologie régionale à Epernay, musée qui ré-ouvrira dans quelques mois après une grande campagne de réhabilitation architecturale du Château Perrier, écrin de prestige qui abrite le musée sur l’avenue de Champagne.

Historienne de l’art, j’étais jusqu’à début 2020 responsable des musées de Beaune, en Bourgogne, ma région d’origine.

A titre personnel, le monde des arts, du patrimoine de la création, des lettres et du vin tient une grande place et guide depuis longtemps mes choix de voyages et de rencontres.

Comment avez-vous connu Archives et culture pop’ ?

J’ai découvert le blog grâce à Sonia Dollinger, Directrice du Patrimoine culturel et responsable des Archives municipales de Beaune, avec qui j’ai travaillé pendant de nombreuses années. Au-delà de nos relations purement professionnelles, nous avons souvent échangé sur nos centres d’intérêt, et notamment sur nos goûts en matière de cinéma et de musique ( de Claude Sautet à Patti Smith, de François Truffaut à Al Pacino !). C’est ainsi qu’elle m’ a parlé de ce blog.

Qu’est-ce qui vous intéresse sur le blog ?

J’ai toujours été intéressée par les possibilités de confrontation, de dialogue et par les espaces de rencontre entre la culture dite noble et classique et la culture dite populaire. Le blog met très bien en avant comment la « culture de masse » et liée au développement d’une société de divertissement – celle de la BD, des séries, de la musique de variété … – a su s’approprier, souvent avec intelligence et sens de l’humour, certaines valeurs et certains sujets de la culture bourgeoise.

Avez-vous apprécié un billet en particulier, lequel et pourquoi ?

Oui j’ai beaucoup aimé le billet sur le roman Ils vont tuer Robert Kennedy de Marc Dugain, un écrivain pour qui j’ai beaucoup d’admiration. Les archives – issues tant du monde familial que de structures professionnelles- sont au cœur du dispositif narratif de cet ouvrage, qui révèle notamment à quel point la mémoire familiale – à travers des archives- est un des éléments constitutifs de la personnalité de chacun.

Kennedy

J’ai adoré également le billet sur le dernier album du groupe Indochine qui correspond à un travail d’introspection et d’exhumation d’archives passionnant.

Avez-vous des attentes particulières pour le futur du blog ?

Oui, parlez du cinéma français et européen et pas qu’américain !!! Je vous donnerai des idées si vous le souhaitez …

Paige, archiviste

Pouvez-vous vous présenter en quelques lignes ?

Je suis archiviste depuis 2 ans, j’ai fait du public, du privé : un peu de tout. Actuellement, suite à la crise sanitaire, en recherche de poste mais c’est plus compliqué que d’habitude de retomber sur ses pattes. Mon plus gros projet, c’est que j’ai commencé à faire des démarches afin de réaliser une thèse sur les archives vidéoludiques en France. Donc je passe une grande partie de mes journées à chercher des financements. Sinon, ma vie s’organise autour d’un cocktail explosif entre ma passion pour les pandas roux, les voyages, la lecture et les jeux vidéo.

Comment avez-vous connu Archives et culture pop’ ?

J’ai connu Archives et culture pop’ à la faculté de Dijon via l’intermédiaire de Sonia Dollinger qui était intervenante dans ma formation de master 2 en Archivistique.

Qu’est-ce qui vous intéresse sur le blog ?

Sur le Blog j’aime particulièrement les articles de la partie littérature / Bande dessinée / Manga et jeu vidéo. Dans le premier cas pour trouver une idée de lecture, à rajouter à ma longue liste de lecture potentielle et dans le second cas pour découvrir des titres de jeu vidéo qui devraient m’intéresser. L’apparition de la partie  » Histoire et témoignages » et une bonne idée afin de découvrir des titres plus réalistes. Je regarde peu par contre la partie film / série ou dessin animé.

Avez-vous apprécié un billet en particulier, lequel et pourquoi ?

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Hum… J’aime particulièrement la littérature jeunesse et deux billets m’ont plus particulièrement. Le premier est « Laisse les gondoles à Venise et viens voir son Chat archiviste« , qui m’a fait acheter Le chat des Archives, complot à Venise Tome 1 ( Toujours pas lu, j’avoue honteusement ! Mais il est dans mes lectures prévues pour cet été). Le second billet qui m’a interpellé est « Des souris et des archives : le mystère des Nigmes » par Marc Scaglione. A la suite de cette belle découverte, le père Noël a emmené ce livre à ma nièce sous le sapin l’an passé : les illustrations extrêmement mignonnes ont été la source du craquage. Je pense que les illustrations du blog sont un réel plus à tous les articles.

Avez-vous des attentes particulières pour le futur du blog ?

Pas d’attente particulière, j’aime bien le parcourir à l’occasion. (J’avoue que les notif Twitter aide bien à savoir quand y a des nouvelles publications ! ).

Le 26 mai 2020, Indochine organise une conférence de presse, en livestream depuis le Stade de France (rien que ça). Le groupe annonce de nombreuses nouveautés, dont la sortie de la chanson Nos Célébrations, ainsi qu’une tournée des stades en 2021 (et j’ai déjà hâte d’y être !)

La conférence de presse commence avec une rétrospective à la fois musicale et historique, d’une durée de près de 25 minutes. On y voit défiler des archives des journaux télévisés de 1981 avec l’élection de Mitterand à 2020 et la crise du Covid-19, et dans le même temps, le défilement des 52 singles du groupe, au fil des décennies, intégrés à ces différents événements.

Indochine

Une rétrospective passionnante, qui nous laisse entrevoir à quel point le monde a changé en quarante ans. Et comment Indochine a évolué, au milieu de tout ça, survivant finalement à tout, même au pire, avec la mort de Stéphane Sirkis en 1999, et une « traversée du désert » dans les années 1990.

LA CHANSON « NOS CÉLÉBRATIONS »

Ensuite, Sirkis et sa bande ont annoncé la sortie d’un unique single pour commencer les célébrations de ce quarantième anniversaire, et qui porte bien son nom « Nos Célébrations »

Voici les paroles de cette chanson, ainsi que le lien vers le teaser du clip, qu’Indochine dévoilera dans son intégralité plus tard :

Je suis comme une histoire et qui n’en finira pas

J’archive le paradis perdu, est-ce-que ça continuera ?

Et qui nous a fait croire que l’on y arriverai pas ?

Je donnerai pas cher de ma peau, je n’donnais pas cher de moi

Est-ce-que tu te souviendras ?

Est-ce-que tu voudras ?

Comme hier à te laisser faire sous la lune et les chevaux

Je serais ton chaos

Oh oh oh oh

À la vie, à y croire

À nos célébrations

Sauver sa peau, sauver son nom

À ne garder que le beau

Je suis la fille, je suis le garçon

C’est nos célébrations

J’étais parti avant, tout seul mais perdant

Le monde entier contre moi à ne rêver que de toi

Alors, j’ai décidé de ne voir que le bien

Il y aura certainement quelqu’un pour m’écouter quelque part

Mais ils n’y arriveront pas à nous dégrader

Moi je t’aimerai encore, encore et jusqu’à ma mort

Je serais ton chaos, oh oh oh oh

Oh oh oh oh, oh oh oh oh

À la vie, à y croire

À nos célébrations

Sauver sa peau, sauver son nom

À ne garder que le beau

Je suis la fille, je suis le garçon

C’est nos célébrations

À la vie, à y croire

À nos célébrations

Sauver sa peau, sauver ce monde

A ne garder que le beau

Je suis la fille, je suis le garçon

C’est nos célébrations

Oh oh oh, oh oh oh

https://youtu.be/D5u8uzOyWPY

Dans cette chanson, le chanteur et auteur du groupe Indochine, Nicola Sirkis, livre son histoire, et l’histoire de son groupe, qui s’apprête à fêter ses quarante ans. A soixante ans, Nicola Sirkis (qui ne semble jamais vieillir) offre à son public une nouvelle chanson optimiste, festive, dans la lignée de l’album 13.

Les archives comme on les connaît sont peu présentes dans cette chanson, mais il mentionne le fait d’archiver dès le début, par la phrase « j’archive le paradis perdu ». Comme à son habitude, Sirkis laisse planer le doute, et on ne sait ainsi pas réellement de quoi il parle quand il mentionne son paradis perdu. Mais il archive, et déroule l’histoire de son groupe, et son histoire à lui.

On sent qu’il a fait défiler les archives de sa vie depuis quarante ans, qu’il les regarde avec une certaine sérénité, et qu’il ouvre la voie à une nouvelle décennie, et qu’il parle de lui tout jeune, qui n’y croyait pas, et qui ne se doutait sans doute pas que, quarante ans plus tard, il remplirait des stades entiers en quelques heures. Allusion flagrante au Sirkis de 1981 par cette phrase « Je donnerai pas cher de ma peau, je n’donnais pas cher de moi ».

Il parle aussi des journalistes, et autres détracteurs qui n’ont pas hésité à assassiner Indochine quand on les voyait moins, mais qu’ils faisaient des albums plus qualitatifs, moins commerciaux qu’à leurs débuts, notamment par cette phrase « Mais ils n’y arriveront pas à nous dégrader ».

LE CLIP DE LA CHANSON

Le clip se présente sous la forme d’une animation, on y voit Nicola Sirkis, aux traits jeunes. Il est dans un train, et commence un voyage à travers le temps, et les archives animées prennent vie sous ses yeux. On y voit les statuts des dirigeants et figures politiques qui ont marqué ces quarante dernières années, de Simone Veil à Nelson Mandela, et même Donald Trump.

Puis le mur de Berlin et le fameux « Baiser fraternel » entre les ex-leaders communistes est-allemands et soviétiques Erich Honecker et Leonid Brejnev, à East Side Gallery, une oeuvre de l’artiste russe Dmitry Vrubel.
Viennent ensuite les clins d’oeil à la communauté LGBTQIA+, si chère au chanteur. Puis ses idoles de jeunesse, Serge Gainsbourg et David Bowie, sous soleil d’un Nicola Sirkis spectateur de cette histoire.

Le teaser du clip se termine sur la fameuse croix noire, logo du groupe depuis les années 2000, construite en télévisions qui diffusent elles-même des archives.

Des archives omniprésentes donc, sous des formes différentes, tant dans la chanson que dans le clip ou encore la rétrospective (qui n’est pas encore en ligne, et que j’aurais aimé vous montrer !). On savait Nicola Sirkis passionné par l’Histoire, cela ne cesse de se confirmer. Et son Histoire à lui, à Indochine, il continue de l’écrire envers et contre tout, pour notre plus grand plaisir.

Justine Remandet