Fortune de France est le premier tome d’une série due à la plume de Robert Merle et qui en compte treize. L’ouvrage paraît en 1977 et couvre la période allant de 1547 à 1566 couvrant ainsi la fin du règne de François Ier pour embrasser les premières années de celui de Charles IX. L’ensemble de la série s’étend jusqu’en 1661. l’ensemble reste inachevé puisque Robert Merle décède l’année suivante.

Quelle est l’histoire ?

Deux jeunes soldats, Jean de Siorac et Jean de Sauveterre ont été anoblis par François Ier après leurs exploits militaires. Ils décident de former une « frérèche » et de s’installer ensemble sur la terre de Mespech, dans les environs de Sarlat et de faire prospérer leur nouveau domaine. Les deux compères embrassent la religion réformée et invitent fermement leur domesticité à les suivre. Jean de Siorac épouse toutefois Isabelle, une jeune catholique de la noblesse locale, qui refuse de renoncer à sa foi. Le couple aura trois enfants, François, Pierre et Catherine. SAmson, fils illégitime de Jean de Siorac est élevé avec eux. Robert Merle conte l’histoire de cette famille élargie qui évolue au milieu des orages qui ne cessent de gronder dans ce siècle mouvementé : peste et guerres de religion traversent ce récit épique.

Et les archives dans tout ça ??

Le fil rouge du récit est le livre de raison tenu à deux voix par Jean de Siorac et Jean de Sauveterre. Ce registre de comptabilité domestique, souvent tenu par le père de famille – ici les deux membres de la frérèche »- renseigne également sur les événements familiaux voire les événements locaux ou nationaux. Il se transmets aux générations suivantes et est un peu la mémoire de la famille. Ici, il est alimenté tout au long du récit et montre les points de vue parfois divergents des deux individus.

Les échanges parfois épineux avec les seigneurs voisins, de religion différente, font parfois l’objet d’un archivage pour conserver la mémoire des échanges et des pactes convenus comme la correspondance échangée avec le baron de Fontenac : « une copie de la correspondance échangée entre mon père et lui à cette occasion fut faite par huissier et confiée au lieutenant-criminel de Sarlat pour être gardée dans ses archives. » Il s’agit ici de conserver trace en cas de litige et donc de pouvoir authentifier les documents, d’où le recours au lieutenant-criminel. Ce sont ces mêmes documents dont on retrouve les originaux dans les archives de Mespech et de Fontenac dans lesquelles Pierre de Siorac puisera par la suite pour retracer l’histoire de sa famille. Il indique par la suite qu’il a conservé toutes les lettres de son père, constituant ainsi des archives utiles à son récit.

Il semble que le lieu de conservation des archives du domaine ne soient toutefois pas idéales puisque Jean de Siorac évoque son grenier et des souris qui pourraient « y ronger quelques papiers que j’y ai et qui ne servent plus de rien« , rappelant ainsi le sort funeste dévolu aux archives délaissées.

L’utilisation des archives privées montre combien ces dernières sont précieuses pour rendre compte des événements connus au niveau du royaume de France mais vécus de manière extrêmement différentes selon les régions et les opinions des individus confrontés à des enjeux qui, parfois les écrasent. Les archives du for privé témoignent au plus près de la vie de chacun, du moins de ceux qui ont pu laisser des traces.

Sonia Dollinger-Désert

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